' « Danger de mort » par Florence Hudelist - Hervé Lesieur
logo

« Danger de mort » par Florence Hudelist

DANGER DE MORT

Danger de mort : avertissement ? prophétie ? formule incantatoire ?

Danger de mort : c’était cela qui était écrit sur la porte. Une porte au treillage métallique serré, fermé par un cadenas.

Barrière défensive à un espace sacré, cette porte était à la fois frontière à franchir et élément d’inviolabilité du lieu.

L’espace intérieur, dans sa pénombre mystique, est un temple. En son centre une table, trois chaises. Peut-être la table du sacrifice, la table de mon sacrifice.

On m’avait parée pour la cérémonie : vêtements d’apparat, cheveux relevés, visage rendant une image fabriquée par un maquillage d’outre-tombe. Je serais au centre, point privilégié du regard, pour des spectateurs attentifs faisant peut-être partie du jeu, du rite. De part et d’autre, deux personnages de noir vêtus allaient m’accompagner dans ce repas funeste.

Un quatrième personnage faisait partie de cette mise en scène. Il était sûrement le plus important : c’est lui qui circulait à loisir dans cet espace fermé, c’est lui surtout qui était le grand manipulateur. Peut-être était-il alors le grand prêtre, le seul à détenir le pouvoir.

Mais à quel dieu allions-nous sacrifier ? L’ensemble des appareils révélant cadrans, compteurs, appareils de mesure, pouvait sembler être les manifestations matérielles d’une divinité mécanique ou énergétique.

Sur la table, au milieu d’objets qui semblaient familiers, couverts, assiettes, verres, un réseau de branchements, tous reliés à une sorte de batterie, créait une perturbation.

Cette perturbation allait bientôt nous apparaître sous plusieurs aspects. Un aspect auditif par le déclenchement des sonneries qui se mirent en action dès le repas commencé. Une perturbation d’ordre sensitive, la plus importante sans nul doute, puisque par le maniement des couverts nous allions absorber une partie du flux énergétique distribué par cette divinité sans image, mais qui, pensions –nous, pouvait avoir suffisamment de force pour nous détruire si elle le voulait.

Nous communions dans une eucharistie étrange où la notion de mystère n’était pas absente.

Le repas pris fin : tintements, sonneries stridentes se turent. Je me levais et sortais de ce lieu magique.

Les lumières s’éteignirent, les portes se refermèrent pour rendre à, cet espace son absolu mécanique. Les portes se refermèrent sur cette mise en garde : Danger de mort.

Florence HUDELIST

► Voir «Le repas electrique»